« Connaître sert beaucoup pour inventer. » (Mme de Staël)

Le pain rationné en 1793

Du pain

   La première carte de pain paraît le 1er août de l’année 1793.  

   Depuis deux mois Paris subit la Terreur et souffre de la faim. Pour obtenir, moyennant 14 sous deux onces (60 grammes) d’un pain « dont les chiens ne berger ne voudraient pas », les ménagères doivent attendre de longues heures aux portes des boulangeries.  Nombre d’entre elles préfèrent s’adresser aux revendeurs qui leur cèdent la même quantité pour… 20 sous !

   Le Comité du salut public du Gros-Caillou[1] s’est insurgé contre une telle pratique. Afin d’y remédier, il a pris l’initiative d’instituer à partir de ce jour une carte de pain obligatoire pour tous les habitants du quartier : il est désormais interdit aux clients d’acheter un poids de pain supérieur à celui auquel chacun a droit ; et aux boulangers de vendre sans carte ou au profit de cartes portant le nom d’autres boulangers.

   On envisage d’étendre l’usage de la carte de pain à l’ensemble de l’agglomération parisienne, mais également d’instituer une carte de viande.  

Mais…

   Les membres du Comité du salut public, lorsqu’ils se réunissent, bénéficient de tables bien garnies. Telle est la volonté de leur président, Cambacérès, fine gueule et grand gourmand :

   « Là-dessus, ils visitent le pot-au-feu, prennent du bouillon, tirent un morceau de bœuf de la marmite pour s’en administrer une bonne tranche qu’ils mangent avec du bon pain blanc et qu’ils arrosent d’excellent bourgogne… »

   Puis on tient séance. Mais quelques-uns, l’estomac réconforté, préfèrent descendre à leur bureau particulier afin de s’y occuper d’affaires particulières. Ainsi fait-on du bon travail pour la grande cause publique. »

Sources : Almanach gastronomique, op. cit.

Remarque : l’auteur ne mentionne pas l’origine de cette dernière citation.

 


[1] Appartient aujourd’hui au 7e arrondissement de Paris. Est resté très rural jusqu’au XVIIIe siècle.

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Date de dernière mise à jour : 08/09/2023