« Connaître sert beaucoup pour inventer. » (Mme de Staël)

Mme de La Fayette auteur de La Princesse de Clèves ?

Qui a écrit La Princesse de Clèves ?

La Princesse de Clèves (Mme de la Fayette)   La Princesse de Clèves, le premier roman d'analyse, fut commencé en 1672, écrit surtout durant l'hiver de l'année 1677, et publié en 1678 sous le nom de Segrais, un intime de Mme de La Fayette. Il est à peu près certain que La Rochefoucauld, ami très intime de Mme de La Fayette, s'il n'a pas directement collaboré à cet ouvrage, en a du moins suivi de près la composition et inspiré des passages, comme en témoigne la correspondance de la comtesse.

   On a même essayé parfois de démêler la part qui reviendrait à chacun d'eux dans la conception de l’œuvre. La thèse de Mme de La Fayette serait qu'il faut toujours accomplir son devoir à l'exemple de sa princesse ; mais La Rochefoucauld aurait ajouté cette amère constatation que de l'accomplissement du devoir résulte souvent la souffrance.

   Il est certain toutefois que l'essentiel provient de Mme de La Fayette, inspirée peut-être par sa propre existence, avec le recul nécessaire à toute littérature : nous sommes loin du Rousseau des Confessions, première autobiographie.

   Et on peut affirmer que l'ouvrage est l'aboutissement naturel de cette abondante littérature romanesque du 17e siècle dont il est, pour ainsi dire, la quintessence : brièveté, style sobre, scrupules moraux et finesse de l'analyse psychologique.

Le mythe de l’Auteur

   Mme de La Fayette a voulu rester anonyme en son temps. Crainte, fausse pudeur, lucidité ? En fait, au 17e siècle, la question de l’auteur est moins importante qu’aujourd’hui. Ainsi peut-on remettre légitimement en cause l’authenticité de certaines pièces de Molière (écrites par Corneille) ou de Shakespeare (dont on doute parfois de l’existence). On sait que La Rochefoucauld entre autres a aidé Mme de La Fayette à rédiger sa Princesse. Ce qui n’enlève rien à la qualité de l’œuvre. Même chose pour les Lettre portugaises (Guilleragues a refusé de les signer, prétextant que l’auteur en était une religieuse).

   En 1968, Roland Barthes écrit : « L’auteur règne encore dans les manuels d’histoire littéraire, les biographies d’écrivains, les interviews des magazines et dans la conscience même des littérateurs, soucieux de joindre, grâce à leur journal intime, leur personne et leur œuvre... L’explication de l’œuvre est toujours cherchée du côté de celui qui l’a produite, comme si, à travers l’allégorie plus ou moins transparente de la fiction, c’était toujours finalement la voix d’une seule et même personne, l’auteur, qui livrait sa confidence. » (« La Mort de l’auteur », Le Bruissement de la langue).     

   Bien entendu, voilà une opinion passée de mode mais qui a fait quelques ravages dans l’enseignement puisqu’on ne parlait plus d’auteur mais de « scripteur » ! Toutefois, reconnaissons qu’une œuvre est celle d’une époque et d’un pays. La création est un processus complexe, où l’empreinte d’un homme singulier n’est pas l’essentiel.

   La notion d’auteur peut illustrer les notions de création et d’origine.      

Sources du paragraphe : Les 100 mythes de la culture générale, Éric Cobats, PUF « Que sais-je », première édition 2010. 

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Date de dernière mise à jour : 28/03/2021