« Connaître sert beaucoup pour inventer. » (Mme de Staël)

Un amour impossible

Comment Julie et Saint-Preux parviennent-ils à endurer l’épreuve d’un amour impossible ?

   « Malheur à qui n’a plus rien à désirer ! Il perd pour ainsi dire tout ce qu’il possède », écrit Rousseau.

   Selon lui, il y a davantage de bonheur dans l’anticipation propre au désir que dans sa jouissance. Une fois atteint, l’objet convoité perd le caractère mystérieux et idéal que lui conférait l’inaccessibilité.  Le plaisir augmente avec l’espoir, tandis que la satisfaction déçoit, au point que la fin de toute attente est synonyme de malheur. Cette ambiguïté du désir, alimenté par la distance, se comprend par son lien avec l’imaginaire. La rêverie et le fantasme magnifient l’être aimé (cf. la cristallisation de Stendhal) et cette illusion n’est pas néfaste puisque les amants vivent dans les chimères.

   Leur union impossible ne font pas sombrer Julie et Saint-Preux dans la frustration ou la souffrance. Ils comprennent qu’ils s’aimeront mieux dans leurs rêves qua dans la vie quotidienne et que le désir retenu peut transformer la volupté en vertu. Leur amour est ainsi sublimé, sans mensonge ni adultère.

   On pense à cette phrase de Marcel Proust : « Le désir fleurit, la possession flétrit toutes choses. »   

Sources : Perrin et Rosenbaum, Citation philosophiques expliquées, Eyrolles, première édition 2007.

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