« Connaître sert beaucoup pour inventer. » (Mme de Staël)

Les Contemporaines (Restif de la Bretonne)

   Un bien long titre, comme on les aimait à l'époque, que ces Contemporaines, ou Aventures des plus jolies femmes de l'Age présent (Restif de la Bretonne).  

   Ces nouvelles (commencées en 1780) évoquent des centaines de femmes, liées entre elles ou à l’auteur lui-même. Elles appartiennent à tous les milieux : duchesses, filles de joie et classes moyennes. On rencontre des charcutières, des libraires, des marchandes des boulevards avec leur éventaire, des ouvrières dans leur atelier.

   Restif décrit des événements, leur langage, leur genre de vie, leurs ressources, leurs habitudes, leurs relations, leurs espérances, ceci pour chaque condition sociale.   

   En tout, plus de 200 métiers féminins (sans considérations techniques). Récits rapides et mouvementés, intrigues sommaires et commentaires moraux.

   Véritable enquête sociologique qu’il poursuit dans Les Françaises (1786), Les Parisiennes (1787), Le Palais-Royal (1790), Les Provinciales (1796).

   Son originalité : s’intéresser à des personnages dédaignés jusque-là par les romanciers français (moins par les anglais), en somme le précurseur de Balzac et Zola, toutes proportions gardées.   

Opinion de Jean-Marie Rouart sur Restif dans l’ouvrage Ces amis qui enchantent la vie (Laffont, 2015, pp. 45-46) :

   « Aujourd’hui, un homme tel que Restif apparaîtrait comme un phénomène de foire : une telle santé, si peu de précautions en matière de style, tant de bonhomie et de simplicité font de lui un auteur licencieux un peu à port. On est bien loin des complications sadomasochistes de Stade, des ténébreux alambics érotiques de Georges Bataille… Si Restif semble aujourd’hui aussi rafraîchissant, c’est que nous avons perdu m’habitude du naturel. Le 18e siècle si sophistiqué soit-il dans son art de vivre est souvent d’une grande simplicité dans son expression : on y appelle un chat un chat… Le style de Restif n’a pas été domestiqué par les préceptes de l’Académie, le bon ton de la cour… Les aventures amoureuses telles qu’elle sont décrites au 18e siècle, que ce soit par Marivaux, Alexandre de Tilly, Crébillon fils ou Laclos (nombreuses pages sur le site), sont des opérations éminemment mentales : pour Laclos, général d’armée, il s’agit de développer avec les femmes les principes de stratégie que l’on emploie pour conquérir les places fortes ; quant à Marivaux, il considère l’amour comme une alchimie d’une extraordinaire complexité dont il se plaît à élaborer et à résoudre les énigmes. »

_ _ _ Fin de citation   

* * *

Date de dernière mise à jour : 21/07/2021