« Connaître sert beaucoup pour inventer. » (Mme de Staël)

Audiger et La Maison Réglée

La maison reglee audiger

   Audiger, ancien chef d’office chez la comtesse de Soissons, puis de Colbert, fait paraître en 1692 son ouvrage La Maison Réglée et l’Art de diriger la Maison d’un grand seigneur et autres, tant à la ville qu’à la campagne, et les devoirs de tous les officiers et autres domestiques en général.   

Le maître d’hôtel

   Il veille sur les dépenses qui se font journellement dans une grande maison, selon les instructions du seigneur et de son intendant. Il choisit les cuisiniers et les marchands qui approvisionnent la demeure, notamment le boulanger (pain de table et pain des domestiques), il doit s’y connaître en vins, en liqueurs et en viande.

   Il a soin des batteries de cuisine et d’office.

   Il fournit également l’écurie en pelles, fourches, étrilles, époussettes, seaux balais et chandeliers.

   Il doit savoir régler et disposer les services de toutes les différentes tables dont le seigneur pourrait vouloir être servi. Par exemple, à une table de six couverts, et pour le service à dîner, on sert ordinairement un grand potage et deux entrées. Pour le second service, un plat de rôts, deux salades ou deux plats de ragoût ou d’entremets, et quelquefois les quatre ensemble. Et pour le troisième service, un plat de fruits et de compotes. Pour le soir et le souper et pour le premier service, on sert un plat de rôts, deux entrées et deux salades ou deux petits plats à la place de ces dernières.  Les fruits sont les mêmes que pour le dîner : un plat de fruits et deux compotes.    

Le sommelier  

   Il a la garde de toute la vaisselle d’or et d’argent, du linge de table, des batteries d’office et de tous les ustensiles font il doit rendre compte au maître d’hôtel. Il a aussi soin du pain et le distribue suivant les ordres du maître d’hôtel.

   On lui donne la clef de la table et il doit rendre compte de chacune des pièces de vin dont il a la direction, les distribuant selon les ordres. Par exemple, un muid (dix-huit hectolitres) doit tenir 280 pintes et par la distribution, il doit rendre compte de 260 pintes tout au plus, du fait qu’il est distribué par petites mesures et à cause de la lie.

Le garçon d’office

   Il ne doit pas manquer, en prenant du linge propre, de rapporter le sale. :-)

L’écuyer de cuisine

   Il est à sa charge de savoir bien faire les pâtisseries froides et chaudes, ainsi que toutes sortes de ragoûts et entremets chauds ou froids… et il doit prendre garde à ne point faire de dégât des choses qui lui sont mises en mains. :-)

Anecdotes

   Audiger raconte comment, voyageant en Italie et passant par Gênes (1660), il vit dans les champs « d’incomparables petits pois ».

   Ils étaient alors le légume-roi à la cour de Louis XIV, dont celui-ci raffolait « à s’en faire crever le ventre ».

   Audiger décide d’en rapporter en France. De Gênes à Paris, le trajet pour ces petits pois « frais cueillis » prend au moins une semaine. Audiger raconte :

   « Le jeudi 18 janvier, j’eus l’honneur de présenter la caisse au Roi grâce à M. Bontemps (premier valet de chambre du roi) qui, pour cela, me fit la faveur de me conduire lui-même au Louvre. Sa Majesté et tous les seigneurs qui sont avec Elle s’écrient que rien n’était plus beau ni plus nouveau ; et que jamais en France l’on n’avait rien vu de pareil pour la saison. Monsieur le comte de Soissons prit même une poignée de pois qu’il écossa en présence de Sa Majesté et qui se trouvèrent être aussi frais que si l’on venait de les cueillir. Sa Majesté ayant eu la bonté de m’en remarquer sa satisfaction m’ordonna de les porter au sieur Baudoin, contrôleur de la bouche, et de lui dire d’en donner pour faire un petit plat pour la reine-mère, un pour la reine, un pour Monsieur le Cardinal (Mazarin) et qu’on lui conserve le reste afin que Monsieur (son frère) en mange avec Elle. »

Sources : Almanach gastronomique, op.cit.  

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Date de dernière mise à jour : 27/02/2024